Dans un livre coup de poing, la chercheure de l’INRA Jocelyne Porcher alerte sur un futur alimentaire “sans animaux” qui se conçoit dans les laboratoires des industriels de la “fake food”1. On y découvre notamment que de puissants financeurs ne sont pas étrangers à la surreprésentation actuelle du discours vegan.
Une petite centaine de pages pour dénoncer la collusion d’intérêts entre “industriels des biotechnologies et défenseurs des animaux” pour “imposer une agriculture sans élevage”2. Voila l’objectif affiché de cet ouvrage publié aux éditions “Le Bord de l’eau”. Tour à tour “secrétaire, éleveure de brebis, salariée en porcheries industrielles et technicienne en agriculture biologique”, désormais chercheure à l’INRA, Jocelyne Porcher dénonce à travers 4 chapitres un secteur financier très actif dans les projets de substituts à la viande.
Elle regrette que le discours abolitionniste occulte l’élevage “traditionnel”, laissant penser que seule la voie intensive et industrielle existe. Selon elle le travail de sape du monde associatif vegan sert à mieux préparer les mentalités à une nourriture toujours plus industrialisée, toujours plus aux mains des plus riches de la planète. Deux marchés se sont ainsi ouverts : celui des substituts végétaux et celui de la viande “in vitro”, deux secteurs qui s’annoncent très lucratifs.
L’auteure s’interroge également sur le développement exponentiel en moins de cinq ans de l’association L214, sur “les intérêts économiques qu’elle sert” 3 et sur la stratégie qu’elle mène notamment à l’égard des enfants à travers sa “filiale” L214 Education : un welfarisme de bon ton qui masque une vision abolitionniste beaucoup plus radicale.
Enfin dans une démarche presque encyclopédique, les 2 derniers chapitres détaillent les différentes forces en présence : célèbres investisseurs américains, associations “nonprofit” et start-up foodtech.
Un ouvrage éclairant sur la réalité économique de la “fake food”.
Cause animale, cause du capital, Jocelyne Porcher, Le Bord de l’eau, 2019, 120 p., 12 €.
1 Terme emprunté à Mark Bittman, chroniqueur culinaire du New York Times ↩
2 Jocelyne Porcher, Cause animale, cause du Capital, Le Bord de l’eau, Paris, 2009, p 5 ↩
3 Ibid, p 62 ↩