Les prairies sont formidables ! Vous vous demandez certainement pour quelles raisons il est bon de s’enthousiasmer pour ces grands espaces verts qui à priori n’intéressent que les vaches, les brebis et autres ruminants. Tout simplement parce que l’intérêt écologique des prairies est multiple et indispensable.
Des surfaces valorisées par le pâturage
Avant tout, il est essentiel de garder à l’esprit que toutes les terres agricoles ne sont pas cultivables. Cela signifie que sur ces espaces, les agriculteurs ne peuvent pas faire pousser de végétaux destinés à l’alimentation (ou très difficilement).
Heureusement les animaux herbivores sont capables d’en tirer profit pour produire des aliments (lait et viande). C’est l’une des raisons pour laquelle les éleveurs, plein de bon sens, mettent leurs animaux en pâture. Non seulement les animaux valorisent ces terres non cultivables, mais en plus ils rendent de sacrés services à l’environnement !
Les prairies sont des puits de carbone
« En zone tempérée, une prairie capte 65 tonnes de CO2 à l’hectare, ce qui en fait un atout majeur dans la lutte contre le changement climatique »1. Ce pouvoir absorbant des prairies compense ainsi en grande partie les 5% d’émission de gaz à effet de serre des ruminants. Les prairies absorberaient même davantage le carbone que les forêts. Selon Alexandre Buttler, professeur au Laboratoire des systèmes écologiques à l’EPFL, « le carbone se fixe plus longuement dans l’humus du sol que dans la biomasse aérienne. Donc les prairies et les herbages sont tout aussi efficaces, et les risques de grandes pertes suite à un incendie sont moindres » (comparé à une forêt). D’où l’intérêt d’entretenir les prairies menacées notamment par l’urbanisation galopante.
Le pâturage permet de lutter contre les incendies
En parlant d’incendie, phénomène trop peu connu, le pâturage, en entretenant les paysages, permet de lutter contre les feux de forêts « dont les conséquences sur l’environnement et la santé publique sont plus qu’importantes »2 : 7% des émissions de gaz à effet de serre sur la planète3 et 340 000 décès indirects dans le monde liés aux particules fines sont générées par les feux de végétation4.
Jocelyne Porcher va dans le même sens en rappelant que « le pâturage de brebis régule la pousse des espèces végétales : il garde les milieux ouverts, ôte les broussailles favorables aux départs des feux ».
Les prairies sont source de biodiversité
Les prairies et les structures qui y sont « associées (bord de champ, haies, talus, fossés, …), […] sont aussi source de biodiversité et fournissent des habitats pour la faune sauvage et les insectes pollinisateurs » rappelle Jean-Louis Peyraud, Directeur scientifique adjoint Agriculture à l’Inra. Plusieurs études réalisées avec l’INRA5 ont même démontré en ce sens que les sols des prairies sont « plus riches en biomasse microbienne et en biodiversité que les sols des cultures ».
Le bocage français s’accompagne en effet de 700 000 km linéaires de haies6, ce qui en fait « une infrastructure écologique de premier choix »7 selon Sylvie Brunel, professeure de géographie à la Sorbonne. « Les ruminants suscitent par leurs rejets une vie animale et végétal incroyablement variée, enrichissent les sols »8. Ainsi,
« une vache au champ suscite par ses déjections l’équivalent de 10 vaches de matière organique bien vivante dans les sols (vers de terre, insectes, micro-organismes) »9.
Les prairies filtrent l’eau et permettent de lutter contre l’érosion des sols
« Une prairie est un filtre qui capte les polluants issus de l’air, nettoie et purifie les sols, et protège la ressource en eau »10. Le programme Genosol conduits avec l’INRA, a ainsi démontré que les sols des prairies sont 20 fois moins sensibles à l’érosion et filtrent mieux les eaux. C’est pour cette raison qu’il est demandé aux agriculteurs « de créer et d’entretenir des bandes enherbées le long de leurs champs cultivés et en bordure des cours d’eau »11.
Le pâturage permet de lutter contre la désertification
Enfin, et c’est peut-être l’un des points les plus importants, la disparition des prairies conduit à une désertification. L’INRA précise en effet qu’ au « cours du 19e siècle, un milliard d’hectares de terres arables a disparu dans le monde, soit la surface des Etats-Unis. La cause principale en est la disparition de l’élevage et de ses fonctions régulatrices, qui a conduit à une désertification des terres. Les sols pâturés contribuent en effet par leur texture et la couverture en herbe à la limitation des pertes d’eau par ruissellement et à la recharge des nappes phréatiques ».
1 Plaidoyer pour nos agriculteurs, Sylvie Brunel, éditions Buchet Chastel, p. 90 ↩
2 Végano-sceptique, regard d’un éleveur sur l’utopie végane, Pierre-Étienne Rault, éditions Dauphin, p. 99 ↩
3 Van der Werf et al. 2010 ↩
4 Johnston et al. 2012 ↩
5 Institut national de la recherche agronomique ↩
6 Plaidoyer pour nos agriculteurs, Sylvie Brunel, éditions Buchet Chastel, p. 91 ↩
7 Ibid, ↩
8 Ibid, ↩
9 Ibid, ↩
10 Ibid, p. 89 ↩
11 Ibid, ↩